L'émorfiloir

"L'émorfiloir"

Cet instrument curieux et surprenant sert à émorfiler le tranchant d’une lame finement affûtée.

Ne trouvant pas de désignation exacte de cet objet rare, je l’ai nommé: «l’émorfiloir» (ceci dit sans dogmatisme péremptoire).

L’aiguisage des outils tranchants, en l’occurrence ici des ciseaux et des gouges du sculpteur sur bois, était effectué à la meule circulaire douce (photo). Sa vitesse de rotation lente et le fait de toujours mouiller la pierre permettaient d’éviter de trop creuser le métal mais aussi de ne pas le brûler.

La finition de l’affûtage était (et est encore) effectuée à l’aide de la pierre de Vielsalm appelée coticule (photo).

Il est nécessaire de mouiller la pierre de coticule et de la parcourir en faisant des huit avec les lames ou les tranchants des outils (opération délicate qui nécessite de l’expérience !).

Coticule : Sorte de schiste cristallin d’une très grande dureté et dont les cristaux microscopiques de grenat spessartine lui confèrent un grand pouvoir abrasif allié à une finesse exceptionnelle.

Les gisements dont le coticule est extrait ne se trouvent que dans la région de Vielsalm et nulle part ailleurs dans le monde, gisements malheureusement quasi épuisés.

La gouge est une sorte de ciseau à bois dont le fer est en forme de gouttière.

La difficulté consiste à conserver le biseau adéquat du taillant (trop effilé, il risque de se casser et trop obtus, il ne coupera pas suffisamment).

Et le morfil dans tout ça ?

Ce sont de petites parties d’acier, presque imperceptibles, qui restent au tranchant du taillant de l’outil et qui peuvent encore gêner la coupe.

Pour enlever ces micro-particules, on passe la lame sur un cuir huilé. (Rappelons-nous les rasoirs !)

Comme la gouge est concave, il faut achever d’enlever le morfil avant de s’en servir utilement. L’é morfiloir (photo) est constitué de plusieurs bagues de plomb; il faut rechercher la bague qui correspond au mieux à la cambrure de la gouge à émorfiler.

Cela doit être fait avec un très léger angle d’attaque afin d’éviter d’arrondir le canal intérieur (ou le dessous) de la gouge.

CQFD.

J. Andrien

print Paru dans le n° 468 de urlBlegny Initiatives de septembre 2015

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