Le Bain-marie

Le Bain-marie

Cela faisait déjà plusieurs jours que Joseph se plaignait de mal au ventre.

Marie, son épouse, bien que très attentionnée, arrêta de le plaindre et l'enjoignit d'aller chez le médecin.

C'est avec la peur au ventre et des pieds de plomb qu'il alla au cabinet (du docteur évidemment).

Là, après interrogations, auscultations et palpations, le diagnostic fut bref et précis : " Vous avez une colite ! ". Joseph demeura interdit, subjugué... Il n'avait pas compris !

Mais le toubib le rassura derechef : " Ce n 'est pas grave, c'est l'affaire de quelques jours... J'ai quelques échantillons de médicaments à prendre dans le rectum chaque matin après défécation. Après "inoculation", la solution "infusée" libérera le pouvoir "analgésique" et "curatif" des agents actifs dans le colon. La forme spéciale est "supposée" en favoriser l'absorption et la dilution progressive. Revenez me voir dans quelques jours s'il n'y a pas d'amélioration ".

Joseph s'en retourna chez lui, tenant les précieux médocs dans sa main.

A peine entré, il interpella Marie et lui demanda :

" Avons-nous un rectum nous autres, Marie ? "

Et son épouse de répondre avec emphase : " Non hein ! On n 'a jamais eu ça; c'est bon pour les jeunes hein ça ! ".

Alors Joseph s'adressa à son fils : "Gamin ! Va un peu chez le voisin et demande-lui s'il veut bien prêter son rectum".

De retour le gamin rapporta ce message : " Il en avait un mais il l'a cassé depuis longtemps ". Et l'autre voisin de répondre : " Je suis désolé car je suis justement entrain de faire ma soupe dedans ".

Alors Marie, ingénieuse, compte tenu des informations entendues suggéra que l'on pourrait diluer le médicament progressivement au bain-marie (photo). Elle avait utilisé le bain-marie pour chauffer les biberons des enfants ou encore pour faire des préparations, comme faire fondre du chocolat par exemple... Ce procédé ne risquait pas de brûler les denrées.

Joseph avala la mixture et exprima un " pouah " de dégoût ! " Ah ! Que c'est mauvais ! ".

Et Marie de dire : " Plus c'est mauvais et plus c'est bon pour ce que tu as ".

De retour chez le médecin, celui-ci anticipa la question : " Alors ? Ces suppositoires vous ont-ils fait du bien ??? ".

Joseph, dépité, répondit : " Pas plus de bien que si je me les avais mis dans l'c... ".

Après réexamens mais surtout nouveau questionnement, le nouveau verdict fut : irritation de la paroi intestinale due à un excès de consommation de jus de pamplemousse.

Cette fois, Joseph sortit de la consultation sans médicament mais avec une interdiction de boire du jus de pamplemousse... Et le mal disparut.

Li "Bain-Marie"

Çoula féve dèdja sacwants djoûs qu' Djôzèf aveût må s' vinte.

Marèye si feume, bin qui tofér ås p'tits swins por lu, arèsta dèl plinde èt lî k'manda d'aler å docteûr. C'è-st-avou l' sogne å vinte èt lès pîds d' plonk' qu'ala å cabinèt (dè docteûr come di djusse)

La, après lès kèsses èt passé l' vizite (adûzé, atouché, kisinti), li rèsponse fourit coûte èt nète : "- Vous avez une colite !"

Djôzèf dimora ståmus'…I n'aveût rin compris ! Mins l' docteûr èl rik'fwèrta d'adram': "Ce n'est pas grave, c'est l'affaire de quelques jours… J'ai quelques échantillons de médicaments à prendre dans le rectum chaque matin après défécation. Après inoculation, la solution infusée libérera le pouvoir analgésique et curatif des agents actifs dans le colon. La forme spéciale est supposée en favoriser l'absorption et la dilution progressive. Revenez me voir dans quelques jours s'il n'y a pas d'amélioration".

Djôzèf ènnè rala è s' mohone tot t'nant lès précieûs médicamints è s' min.

A ponne rintré, il-ahouwa Marèye èt lî d'manda: "- Avans-gn' on rèctum nos-ôtes ?"

Èt s' feume di lî rèsponde avou sès grands-êrs: "-Nèni hin ! Nos n'avans måy avou çoula; c'èst bon po lès djônes, dê !"

Adon Djôzèf arinna s' fi: "- Gamin, va-s' on pô d'mander å vwèzin si vout bin pruster s' rèctum". Rintré, l' gamin rapwèrta l' mèssèdje :"- Énn'aveût onk, mins i-n-a dès timps qu'i l'a spiyî." Èt l'ôte vwèzin di rèsponde: "- Dji so bin-anoyeûs, mins dji so djustumint a cûre mi sope divins."

Adon Marèye, fwète d'aveûr ètindou lès-informåcions propôza di fé fonde li drouke pitit-a p'tit å "Bain-Marie" (foto). Èle s'aveût chèrvou dè "Bain-Marie po rèstchåfer lès biberons dès-èfants ou bin èco po fé fonde dè chôcolåt, par-ègzimpe. Avou cisse manîre di fé, i-n-a nou dandjî d' broûler l'amagnî.

Djôzèf avala l' bolêye èt s' fa comprinde d'on "pwouah !" Èt Marèye di rèsponde: "-Pus' c'èst måva, èt pus' c'èst bon po çou qu' t'as."

Rèvôye å docteûr, ci-chal dèrit d'adram': "-Alors ? Ces suppositoires vous ont fait du bien ? "

Djôzèf abatou rèsponda "- Nin pus' di bin qui si dj' lès-aveû mètou è trô di m' cou."

Après réègzåmins, mins ossi dès-ôtès kèsses, li novèle dècîzion fourit:"-Irritation de la paroi intestinale due à un excès de consommation de jus de pamplemousse."

Ci côp chal, Djôzèf vina foû dèl consultåcion, sins drouke, mins disfince dè beûre dèl djuzêye di pamplemousse… Èt l' må fourit djus.

Joseph Andrien

print Paru dans le n° 528 de urlBlegny Initiatives de mars 2021.

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