Les rapiéçages
Sur certaines images du passé, on peut voir un homme vêtu d’une longue chemise de nuit, coiffé d’un bonnet dont la pointe tombante se termine par un pompon et qui se déplace avec un bougeoir à la main... Vous voyez?
Cette évocation pour illustrer le type de chemise que l’on portait autrefois.
Le pan arrière des chemises tombait jusqu’à la pliure des genoux; il était alors ramené entre les jambes emmaillotant le postérieur des hommes.
Grand-maman veillait toujours que la tenue de grand-papa soit toujours «présentable» comme elle disait. Aussi, quand elle constatait que le col et les manchettes étaient élimées : elle entreprenait une sérieuse restauration de la chemise. Cela consistait à démonter le col et les manchettes, à les «reconfectionner» à partit d’une bande de tissu prélevée sur une bonne partie du pan de la chemise...
La chemise écaudée*, ainsi rénovée, retrouvait une nouvelle jeunesse pour un certain temps...
L’ensemble continuant à s’user; on envisageait alors un «déclassement» du vêtement mais pas pour autant le rebut de ce dernier...
Le carré d’étoffe, constituant le dos de la chemise était prélevé puis ourlé pour en faire un essuie de vaisselle ; lequel en fin de vie allait se transformer en une lavette pour «faire» la vaisselle...
Cela se passait juste après la guerre.
Au musée, on peut voir une taie d’oreiller qui a été rapiécée, «re-rapiécée» ainsi que reprisée et même rafistolée.
On ne jetait pas de sitôt à l’époque ; les empiècements ainsi que les déchirures vestimentaires n’étaient pas à la mode mais provoquaient plutôt la gêne voire la honte.
Aujourd’hui, trous, pièces, ravaudages, effilochage sont autant d’artifices justifiant une augmentation des prix pour être «dans le vent» comme on dit.
(*archaïsme signifiant privée de sa queue)
J. Andrien
Paru dans le n° 458 de Blegny Initiatives de novembre 2014